Portait de PaysanNature

L’agriculture pour moi, ce sont des générations d’agriculteurs successives dans ma famille. J’aurais difficilement pu faire autre chose. Quand j’ai commencé, l’agriculture n’était pas comme aujourd’hui, on était en recherche de performances, de records de productions ( et ça a été, quelque part une réussite) mais on voyait déjà des choses qui se préparaient agro écologiquement…. On ne connaissait pratiquement que la technique du labour en France. Déjà ça ne me plaisait pas, pourtant j’ai même gagné des concours de labour. Comme quoi, ce n’est pas impossible de se remettre en cause. La première alerte est apparue dans les sols à faible potentiel , avec le travail du sol on obtenait déjà de mauvaises couleurs de terre, des terres de couleurs différentes, et ça m’inquiétait de remonter cette mauvaise terre inerte en surface avec la charrue. En bonnes terres profondes, fertiles, l’inquiétude agronomique est beaucoup plus longue à venir …. Je me suis intéressé à réduire le travail du sol dès que j’ai pu et ensuite rencontré des gens qui m’ont donné cette ouverture d’esprit. L’énorme chance que j’ai eu dans ma vie, c’est de rencontrer Lucien Séguy. À l’époque, il y avait peu de personnes en France qui s’intéressaient à l’agriculture de conservation, surtout pas la recherche agronomique et les médias agricoles. L’un des premiers pionniers était Jean-Claude Quillet et les voyages agronomiques de la revue TCS ont été une source intarissable de solutions pour nos sols, Il y avait autant d’échanges dans le car que sur les visites de fermes, c’était très riche en qualité d’échanges. Après, Jean-Claude m’a fait rencontrer Lucien, et Lucien ne m’a plus jamais lâché. Il voulait que son travail soit partagé par un maximum de personnes, c’est ce que j’essaie de continuer difficilement aujourd’hui. Lucien, c’était un génie. Il a visité énormément de situations partout dans le monde et en a pris le meilleur. Il s’est créé son expérience avec ses voyages. C’est certainement l’agronome qui a visité le plus de parcelles agricoles au monde. Il ne faisait que ça, partout. Quand tu as la chance de côtoyer un bonhomme comme ça, c’est merveilleux. Après, quand on le perd, on est malheureux. Ma rencontre avec Lucien a vraiment été le déclic, il m’a fait comprendre ce que c’était le génie végétal, que la Nature est le meilleur scientifique en recherche constante depuis toujours. Il m’a aussi ouvert les yeux sur le rôle central de la photosynthèse, ce processus fondamental par lequel les plantes captent l’énergie du soleil pour transformer le dioxyde de carbone et l’eau en matière organique, tout en libérant de l’oxygène. Ce miracle de la vie, qui nourrit les sols et régule le climat, a été gâché par des décennies de mauvaises pratiques humaines : labour intensif, monocultures, déforestations à outrance, sols nus exposés au soleil et à l’érosion. En détruisant la végétation, nous avons brisé ce cycle vital, appauvri nos sols et libéré dans l’atmosphère le carbone que le sol stocker. C’est pour ça que ça m’énerve aujourd’hui de voir encore des hectares de terre labourée, du béton dans les villes, du bitume étalé partout… ! Ça devrait être vert partout. En fin de compte, c’est la végétation qui fait tout. Quand on a de la végétation, on a des racines, des mycorhizes, de la glomaline, des bactéries, de la vie… On capte tout, on va chercher l’eau, on empêche les variations de température, et surtout, on maximise la photosynthèse pour enrichir le sol en matière organique. Cette matière organique, c’est le carburant de la vie du sol, c’est ce qui permet de séquestrer le carbone, de retenir l’eau et de nourrir les plantes. En couvrant nos sols de végétation diversifiée, comme le prône l’agriculture de conservation des sols, nous restaurons ce cycle vertueux, nous redonnons à la photosynthèse toute sa puissance pour reconstruire des sols vivants et résilients. La société, les médias aujourd’hui parlent de l’air, de l’eau, mais jamais des sols. Et pourtant, ils sont bien plus importants, trop mal connus. Les communes, les particuliers, les entreprises, tout le monde veut bitumer pour ne pas « salir » ses petits souliers ou pour faire rouler les trottinettes. C’est pour ça qu’on veut faire, qu’il faut faire, qu’on doit faire de l’agriculture de conservation des sols : conservons nos sols ! Et parlons-en un maximum… ! Tout le monde est responsable. En appliquant l’ACS, avec des couverts végétaux permanents, des rotations diversifiées et un travail minimal du sol, nous pouvons non seulement préserver nos sols, mais aussi amplifier la photosynthèse à grande échelle, contribuant ainsi à lutter contre le changement climatique tout en restaurant la fertilité naturelle. Sur les surfaces non agricoles, la société a un énorme effort à faire en « acceptation de verdissement »…En gestion de déchets organiques qu’elle produit et qu’elle gâche et gaspille …. Il y a deux choses que l’humanité doit retenir pour gagner un peu de temps sur son passage sur cette planète. La notion de cycles en équilibre, revoir aussi notre gestion de nos déchets comme dans la Nature. Et après, le sol, ( libérons le du bitume le plus possible )…..Le sol vivant qui filtre l’eau et la rend potable, c’est un réservoir de nourriture pour les plantes, c’est le support de la végétation qui elle capte infiniment la photosynthèse . Ce sont les plantes qui créent le sol, mais les plantes ont besoin de sol, d’eau et d’air. Tout ça, c’est lié, c’est global, comme le répétait inlassablement Lucien .. Et au cœur de ces cycles, il y a la photosynthèse, ce moteur universel qui alimente gratuitement la vie sur Terre. En labourant, en laissant les sols nus, l’humanité a gaspillé ce potentiel incroyable, libérant le carbone stocké et dégradant les écosystèmes. En adoptant l’ACS, en couvrant les sols de végétation le plus possible partout, nous pouvons réparer ces erreurs, relancer les cycles naturels et redonner au sol sa capacité à soutenir la vie et toute la biodiversité qui l’accompagne…..J’aimerai préciser ici, que « l’Agriculture Biologique » n’a aucun avenir, tant qu’elle n’abandonnera pas le travail mécanique du sol ….ça ne plait pas quand on précise cela mais on doit très vite trouver des solutions pour que toute les agricultures essaient de se passer le plus possible de ce travail mécanique de sol et de l’énergie qu’il exige (c’est aux racines et à la vie du sol de maintenir une structure de sol solide ) vers l’ACS-BIO…. Le peu de sol que les jeunes ont entre leurs mains, il faut absolument qu’ils le préservent, qu’ils le fassent vivre, qu’ils le protègent en y touchant le moins possible. Pour quelqu’un qui se pose des questions, je dirais de rencontrer plein de monde et d’échanger énormément. Tout seul, c’est pas facile de se rassurer, surtout quand on a fait une erreur, (je suis champion des erreurs) Il faut apprendre à regarder le sol. Si l’on a des structures prismatiques, le semis direct ne marchera pas. Ça, c’est par la formation qu’on y arrive. Il faut rencontrer des gens qui vous expliquent que ce sont les racines et la Matière Organique qui sont les solutions. Maintenant, je n’ai plus envie d’être gentil. Je dis « réagissez, dépêchez-vous ». Il n’y a plus le temps de s’amuser avec la ferraille mobile même si elle a une belle couleur. Il faut dire aux jeunes qui envisage ce métier, ne vous émerveillez pas devant un tas de ferraille, un tracteur, bleu, vert, rouge, d’ailleurs demain ce seront des robots qui les remplaceront. Émerveillez-vous plutôt devant votre sol, c’est votre meilleur outil. La couleur doit être foncée, la plus foncée possible ! Ça veut dire aussi que, quelques fois, avec très peu de matériel, on arrive à faire du très bon boulot. Quand on a compris « nourrir et protéger », on a résolu un tas de problèmes : les limaces, taupins, pucerons, corbeaux, sangliers…etc . Et il faut s’échanger les trucs qui marchent. Souvent, on me questionne aussi sur la tendance des purins, macérations, etc. Ces démarches sont valables pour aider à sortir du travail du sol, pour viser un sol vivant. Tout ce qui peut nourrir et protéger le sol nous intéresse. On s’aperçoit que quand on a un historique de non-travail du sol avec des plantes multiples de service, on a remis en fonctionnement nos sols. Ils sont naturellement imbibés de réactions bénéfiques qui se sont faites toutes seules. En favorisant une couverture végétale constante, on relance la photosynthèse à plein régime, ce qui stimule la biologie du sol, augmente la séquestration du carbone et restaure les équilibres naturels. On retrouve des cycles et des équilibres.

En misant sur la puissance infinie de la nature et de sa photosynthèse gratuite, nous pouvons rapidement reconstruire des sols robustes, vivants et fertiles, qui seront la base d’une alimentation humaine durable et saine pour les générations de demain.

Noël, PAYSAN dans la Nature …!!

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